Ouverture d’IBM Connect : vous avez dit social ? Non. Juste normal.

Depuis qu’on parle de Social Business, une Opening General Session à IBM Connect (ex Lotusphere) se décompose comme suit : une vision longuement exprimée, une proposition de valeur à affirmer et la présentation des outils qui vont dans un futur proche le rendre possible. Et comme sur tout marché émergent, l’outil a souvent un peu de retard sur la vision. Logique puisque la vision précède la roadmap. Et avec le temps l’écart se creuse et la vision rencontre le produit : ça s’appelle le business. Pas celui qu’on a rêvé mais celui qu’on fait.

Un produit qui rattrape une vision à un nom : le business. Le vrai.

C’est ainsi qu’après qu’on ait rappelé des faits, chiffres et enjeux on est rapidement passé aux produits. Avec, comme je le prédisais, des améliorations d’ordre essentiellement incrémentales. Donc essentielles. Je m’explique : depuis quelques années des efforts considérables ont été faits pour rendre les réseaux sociaux d’entreprise enfin utilisables. Ergonomie, interface, intégration avec les outils du quotidien. Tout ce qui donnait au moins une raison valable de ne pas les utiliser a donc été peu a peu réglé jusqu’à faire de la plateforme sociale une pièce très acceptable du poste de travail. Maintenant les prochaines étapes concernent le “dernier mile”, celui qui fera d’un outil acceptable le centre du poste de travail collaboratif. On en parlera en détail avec les évolutions annoncées de produit dans des articles à venir mais les annonces portent principalement sur trois axes.

Enrichissement à la marge : tous ces petits détails qui fonctionnent bien mais que les retours utilisateurs permettent d’affiner ou des fonctionalités qui viennent enrichir le panel des outils disponibles sans pour autant révolutionner un outil. Parlant d’IBM Connections on citera pour l’exemple le “like” qui se généralise à tous les contenus, peut être fait plus simplement sans passer par l’embedded expérience du flux d’activité ou alors une fonction de sondage qui va permettre de se passer d’outils tiers très bien faits mais non intégrés dans le poste de travail.

Intégration et cohérence : la logique de travail est idéalement un flux continu là où la logique outil oblige souvent à jongler entre les plateformes. Pourquoi devoir changer d’outil et de “lieu” de travail en fonction du type de contenu ou d’interaction ? L’activity stream en général propre au réseau social envahit l’email (qu’il soit Notes/Domino ou Outlook/Exchange). Pas seulement pour consulter mais de manière actionnable.  L’instant messaging intègre le flux d’activité également et l’intégration entre le bureau du PC ou les périphériques mobiles et le réseau social fait qu’on peut synchroniser en permanence ses documents d’un outil à un autre sans “upload” fastidieux et les copier par simple “draf and drop”. A priori on appellera ça de l’intégration, mais à mon sens c’est de la cohérence : rendre possible la bonne interaction peu importe l’application dans laquelle on se trouve. Et l’air de rien on se dirige plus de plus en plus vers le poste de travail digital et unifié. Bref une somme de petits détails qui au bout du compte évitent les un ou deux clics superflus qui rompent le flux de travail.

Mobilité : un troisième volet qui procède un peu des deux premiers. Le mode de travail ne doit pas dépendre du contexte physique de travail. Autrement dit l’utilisation de périphériques mobiles doit permettre, à quelques ajustements près dus à ce qui est réaliste sur une taille d’écran donnée, de pouvoir faire ce qui doit être fait sans avoir à attendre de pouvoir utiliser un ordinateur portable ou de bureau.

Le social c’est normal.

Conséquence : cette OGS a été marquée par un enchainement très factuel d’améliorations concrètes et de cas clients spécifiques. Beaucoup plus rythmée que le modèle “vision-valeur-outil” traditionnel. Beaucoup plus difficile à suivre également pour les mêmes raisons.

Et les différentes démonstrations vont dans ce sens. La cohérence entre les outils, du mail au réseau social en passant par l’instant messaging ou le portail donne change la vision des cas d’usages. On aurait pu enlever “social” du discours tellement il apparait que la cohérence de l’environnement de travail ainsi proposé rend les choses “normales”, évidentes. L’usage ne se heurte plus aux murs des silos applicatifs et si l’outil ne fait pas tout dans ce type de démarche il va désormais cesser de jouer les goulots d’étranglement. Il se banalise, se normalise.

Quoi qu’il en soit le visiteur qui auparavant sortait d’un événement “social business” avec des rêves pleins les yeux en repart sans rêve mais avec pleins d’idées concrètes et opérationnelles.

Quoique. Il y a quand même eu trois sujets qui n’en sont, à mon avis, qu’à leurs débuts et sur lesquels tout reste à découvrir, inventer, construire. La part de rêve que chacun recherche sur une session d’ouverture.

Les nouvelles frontières : talents, analytics et informatique cognitive.

La première concerne la dimension “workforce management”, incarnée par Kenexa. Il s’agit d’un produit existant qui était déjà utilisé par un grand nombre de grandes entreprises avant le rachat par IBM. La notion de management de cycle de vie du talent est tout sauf nouvelle, par contre ce qui va l’est c’est les synergies que de telles solutions peuvent développer avec des plateformes dites sociales, notamment grâce à l’utilisation poussée des “analytics” pour faire du prédictif.

Justement les analytics seront surement un des grands enjeux de demain. Comme l’a dit sur scène Mike Rhodin, VP Software d’IBM, “les analytics sont le nouveau langage du business”. Quelque chose qui est évident tant on accumule aujourd’hui les données non structurées, éparses, auxquelles il faut donner du sens pour prendre des décisions informées en quasi-temps réel. Mais d’un point de vue purement managérial on est en terra incognita et 98% du potentiel reste à découvrir…ainsi que 99,9% de l’évangélisation à faire.

Un dernier point concerne une nouvelle forme d’informatique. On a beaucoup parlé de Watson depuis deux ans. Mais le prototype est devenu depuis un produit utilisé désormais dans certains secteurs d’activité avec succès, ce qui permet de regarder un peu plus loin. Mike Rhodin a employé le terme d’informatique cognitive pour désigner ce concept d’un genre nouveau et unique. Dans un monde ou l’homme partage et rend ses données et savoirs de plus en plus accessibles, la matière est en effet quasi infinie pour ces machines capables d’apprendre, identifier et donner du sens à l’information. Là encore une révolution organisationelle nous attend avec un vrai débat sur la place de l’homme dans les organisations de demain et le futur du travail. Mais ça c’est un autre sujet.